lundi 4 octobre 2010

Aux origines de la caste des prêtres

Les historiens sont aujourd’hui unanimes pour considérer

qu’Abraham était originaire de Ur en Chaldée,

dans ce qui est aujourd’hui l’Irak. A cette époque les

hommes étaient polythéistes. Il y avait donc beaucoup

de cultes différents et beaucoup de prêtres.

La famille où grandit Abraham évoluait donc probablement

dans ce milieu polythéiste et païen, comme la

plupart à l’époque. Or, dans le paganisme les prêtres

occupent une place centrale.

Abraham vécut dans la 1ère moitié du 2ème millénaire

avant Jésus-Christ, à l’époque sumérienne, du nom du

peuple qui vivait alors dans cette région, la Mésopotamie,

dont Babylone était la capitale. Comme beaucoup en

ce temps-là, les Sumériens adoraient de nombreux

dieux. Le service rendu à ces dieux était assuré par

une caste de prêtres très hiérarchisée servant de médiatrice

entre ces dieux et les hommes.

Afin de rester dans les bonnes grâces des dieux et

de ne pas s’attirer leur courroux, on procédait régulière-

Le culte païen des sacrifices et l’aspiration

au pouvoir de la caste des prêtres.

Qui a vraiment rédigé le Pentateuque ?

59

ment à des sacrifices d’animaux, mais aussi parfois à

des sacrifices humains.

La caste des prêtres régnait également sur la ville et

sur l’Etat. Le roi était investi à la fois de l’autorité politique

et spirituelle suprême. Ainsi, une de ses principales

fonctions consistait à tout mettre en oeuvre pour satisfaire

les dieux afin d’assurer la prospérité du pays et

le bien-être du peuple. Pour témoigner sa reconnaissance

aux dieux, on n’hésitait pas à sacrifier ce que

l’on avait de plus précieux. A cette époque, tout comme

aujourd’hui parfois encore, c’est l’enfant mâle premierné

qui était ce que les parents avaient de plus cher.

C’est donc lui qui était offert en sacrifice.

La Bible qui a conservé le souvenir de ces pratiques

nous en livre témoignage à travers l’épisode où Dieu demande

à Abraham de lui offrir son fils Isaac en sacrifice.

Mais en réalité, Dieu n’a jamais parlé ainsi. Ce qu’il attendait

d’Abraham c’était le sacrifice de son attachement possessif

envers son fils, dans la mesure où il avait pour

tâche de n’être pas seulement le père d’un seul mais celui

de tout le peuple hébreu. Abraham, tellement imprégné

des conceptions polythéistes de son époque, interpréta

tout naturellement le message perçu en lui comme un

appel à sacrifier ce qu’il avait de plus cher, en l’occurrence

son fils bien-aimé.

Ce message mal interprété, Abraham l’avait perçu

dans son coeur, de même que l’ange lui était apparu en

60

vision intérieure. En réalité, la signification de ce message

était la suivante : il n’est pas juste d’idolâtrer ton

fils de la sorte, de le placer au-dessus de tout et qui plus

est, de Dieu. Dieu devrait tenir la première place dans

ta vie. Abraham le premier, et ensuite ceux à qui il fit

part de son expérience spirituelle, l’ont naturellement interprété

en fonction des conceptions religieuses de l’époque

et du milieu dont ils étaient issus.

L’ange qui intervint pour retenir la main d’Abraham

avant qu’il ne commette l’irréparable, exprime la volonté

de Dieu. En effet, Dieu n’a jamais voulu ni demandé un

tel sacrifice. De manière symbolique, Dieu souhaitait

qu’Abraham prenne la main de son fils et qu’ensemble,

ils cheminent vers lui, le Dieu unique de l’amour. La Bible

rapporte qu’après l’intervention de l’ange, Abraham sacrifia

un mouton à la place de son fils Isaac. A ce point,

il convient de rappeler que tous les prophètes envoyés

par Dieu se sont formellement opposés à la pratique de

tels sacrifices. Ce sont les dieux du paganisme qui exigeaient

que des animaux ou des humains leurs soient

sacrifiés.

Abraham, tout imprégné de l’influence des cultes

païens, croit devoir effectuer un sacrifice. Si ce n’est son

fils, alors ce devra être un animal ! En Abraham, se livre

un véritable combat intérieur qui oppose l’Esprit de Dieu,

dont l’influence grandit toujours plus en lui, et les anciens

61

cultes païens. Ce combat s’est poursuivi pendant des

siècles, des millénaires et se perpétue aujourd’hui encore

mais de manière différente, comme le démontre

notre série. Pour combattre ces cultes propagés par la

caste des prêtres et dont la pratique des sacrifices sanglants

est une des marques de fabrique, Dieu a toujours

envoyé aux hommes de véritables prophètes. A travers

ses véritables serviteurs, Dieu a toujours cherché à

éclairer les hommes sur le seul sacrifice valable à ses

yeux : celui qui consiste à déposer le moi humain et à

s’abandonner entre ses mains. En aucun cas il n’a demandé

que des hommes ou des animaux lui soient offerts

en sacrifice.

Depuis les temps les plus reculés, le polythéisme

s’est nourri de peurs et de désirs : peur de perdre son

toit, ses biens, de se voir spolié, maltraité, réduit en esclavage

voire même d’être assassiné ainsi que sa famille,

mais également désir d’échapper à toutes les

peurs et incertitudes de l’existence liées à l’insécurité

de la vie, aux maladies, à la violence, aux intempéries,

etc… Et l’homme a longtemps considéré que seules des

instances aux pouvoirs supérieurs, des divinités, étaient

susceptibles de le protéger de ses dangers. Mais pour

cela, il fallait faire en sorte de leur plaire, de leur être

agréable. Tout ce qui pouvait y contribuer était privilégié.

Tout ce qui pouvait contrarier ce but devait être proscrit

autant que possible. Dans ces conditions, les sacri62

fices représentaient l’acte le plus fort qui soit pour témoigner

aux dieux reconnaissance et respect.

Mais l’enseignement de Jésus de Nazareth introduisit

une rupture totale dans cette façon de considérer

les choses puisqu’il repose sur l’amour désintéressé

qui donne inlassablement, sans rien attendre en retour

et dans le respect absolu du libre arbitre. Tout ce qui

est contraire à ces deux principes ne relève pas du véritable

christianisme !

Durant sa captivité en Egypte,

le peuple d’Israël a adopté de nombreuses

coutumes païennes comme par exemple

les vêtements d’apparat des prêtres

La conception païenne d’un Dieu cruel entretenue

par la caste des prêtres se retrouve également tout au

long des livres constituant le Pentateuque. Ainsi, dans

un des épisodes ayant suivi la sortie d’Egypte, alors

que Moïse redescend du Mont Sinaï qu’il a gravi pour y

recevoir de Dieu les Dix Commandements, il trouve les

Israélites autour d’un veau offert en holocauste, sous

l’influence de la caste des prêtres.

En Egypte, les Hébreux avaient bien souvent assisté

à de tels sacrifices puisqu’ils y étaient couramment pratiqués

par les prêtres égyptiens. C’est ainsi qu’ils adoptèrent

également ces coutumes ainsi que beaucoup

63

d’autres aspects du paganisme. Ils n’avaient pas encore

connaissance d’un Dieu bon et miséricordieux.

Il est de toute évidence que les cultes païens exerçaient

une forte influence à l’époque de Moïse. Pendant leur

captivité en Egypte qui s’échelonna sur plusieurs siècles,

les Hébreux avaient eu largement le temps d’observer

les comportements, les modes vestimentaires, etc…, de

la caste des prêtres et d’admirer la puissance dont celleci

disposait. Dans ces conditions, rien d’étonnant à ce

qu’à leur installation en terre d’Israël, ils aient reproduit

nombre de coutumes qu’ils avaient observées puis adoptées

en Egypte, entre autres les vêtements sacerdotaux

ainsi que nous l’avons évoqué au chapitre précédent.

Les récits de la Bible attribués à Moïse

ont été rédigés en majeure partie,

mille ans après sa mort.

Sous couvert de Moïse, la caste des prêtres

a introduit ses propres conceptions

religieuses dans le judaïsme

On considère généralement Moïse comme l’auteur du

« Pentateuque » alors que ces livres sont l’oeuvre de la

caste des prêtres. Cela vous étonne-t-il ?

C’est pourtant ce que l’on enseigne aux futurs prêtres

et pasteurs dans les universités de théologie. Des

historiens ont retrouvé un document rédigé par des prê64

tres israélites lors de l’exil des juifs à Babylone. Ce document

connu sous le nom de livre des prêtres date du

6ème siècle avant Jésus-Christ. Or, ce qui figure dans ce

texte comporte des similitudes frappantes avec le Pentateuque,

ce qui porte à croire que celui-ci aurait été

rédigé à Babylone par les autorités religieuses israélites.

Ainsi, outre l’influence exercée antérieurement par

le polythéisme égyptien, il faudrait également prendre

en compte l’influence du polythéisme babylonien dans

l’élaboration du culte hébraïque et de ses rites. Bien entendu,

pour accorder une plus grande légitimité à ces

récits, on en aurait transposé l’origine à Moïse et on

aurait fait de ce dernier leur instigateur, à son insu.

Les livres attribués à Moïse ne datent donc pas du

vivant de ce grand prophète mais auraient été rédigés

près de mille ans après sa mort. Les premiers écrits se

référant à Moïse remontent aux rois David et Salomon.

Dans ces documents, aucune allusion n’est faite à l’importance

du rôle des prêtres. En fait, tous les livres et

documents écrits préalablement auraient été « retouchés

» autour du 6ème siècle pour y inclure cet aspect.

Les prêtres se sont donc retranchés derrière Moïse

pour introduire dans l’Ancien Testament leurs propres

conceptions en matière de religion. S’ils ont agi de la

sorte c’est bien entendu pour servir leur pouvoir et le

perpétuer. Le Pentateuque est donc l’oeuvre des prêtres

et non celle de Moïse !

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En se plaçant entre Dieu et les hommes,

les prêtres ont obtenu un pouvoir de

domination considérable qu’ils ont toujours

cherché à perpétuer par la menace

Si tout ce qui touche aux rites et aux vêtements sacerdotaux

est tellement important, c’est parce que ceux-ci

permettent aux prêtres de se prévaloir d’un privilège

exceptionnel : celui d’intercéder auprès de Dieu en faveur

des hommes. Ainsi, pour atteindre le salut de l’âme, pour

adoucir l’humeur de Dieu, pour accomplir les célébrations

rituelles prescrites par le dogme et se comporter

en fidèle bon et obéissant, il faut faire appel aux prêtres

et, à l’occasion, savoir leur témoigner reconnaissance

au moyen d’espèces sonnantes et trébuchantes.

Examinons maintenant cet aspect à la lumière de

ce qu’a dit Jésus de Nazareth et demandons-nous comment

il s’est comporté en la matière et ce qu’il a enseigné

? Jésus a-t-il une seule fois évoqué une quelconque

nécessité d’en appeller au service des prêtres ?

Non ! assurément non !!! Bien au contraire, tout au long

de son ministère, il n’a fait qu’affirmer : « Le royaume de

Dieu est en vous » (Lc 17, 21) Et quand le Fils de Dieu

parle ainsi, il l’affirme haut et fort pour signifier à chacun

qu’il est en relation directe et personnelle avec Dieu et

que, dans ces conditions, le recours à un prêtre ou à

toute institution sacerdotale est inutile et superflue.

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Cette affirmation n’a d’ailleurs rien d’outrancièrement

révolutionnaire puisqu’au sein même de l’Eglise catholique

certains n’hésitent pas à tenir des propos analogues.

C’est le cas, par exemple, de deux théologiens

allemands célèbres : Rupert Lay* et Herbert Haag**.

Ainsi, voilà ce que ce dernier, bibliste de renommée mondiale,

ancien professeur d’exégèse biblique à l’Université

de Tubingen, dit en 1998 lors d’une allocution publique dont

la teneur a bousculé quelques idées reçues : « Il y a longtemps

que les théologiens ont admis que Jésus ne voulait

pas fonder une Eglise ; les dogmaticiens les plus traditionalistes

, eux-mêmes, sont de cet avis.» Et de préciser

: «Pendant longtemps on a cru et on a enseigné

que l’Eglise a commencé avec Jésus-Christ. C’est ce

que j’ai moi-même appris au cours de mes études de

théologie, et de nombreux étudiants après moi. Jésus

aurait appelé des apôtres, et ces apôtres, sentant leur fin

prochaine, auraient désigné des successeurs qui, plus

tard furent nommés évêques. C’est d’ailleurs ce que le

dernier concile nous enseigne : Jésus-Christ, Pasteur

éternel, a édifié la Sainte Eglise en envoyant les apôtres...

et a voulu que leurs successeurs, c’est-à-dire les

évêques fussent, dans son Eglise, pasteurs jusqu’à la

* Rupert Lay («Nachkirchliches Christentum - der lebende Jesus

und die sterbende Kirche», Düsseldorf 1995)

** Herbert Haag («Worauf es ankommt - wollte Jesus eine

Zwei-Stände-Kirche?», Freiburg 1997)

67

fin des siècles (Lumen gentium 18). Ainsi on pouvait faire

remonter la charge des évêques indirectement jusqu’à

Jésus. Celui-ci avait appelé les apôtres et ces derniers

ont nommé des évêques. En réalité, le dernier apôtre avait

depuis longtemps fermé les yeux lorsque les premiers

évêques ont fait leur apparition. Le rôle des apôtres était

tellement exceptionnel que l’on ne peut parler de successeurs

à leur sujet.» Et encore «Les théologiens

d’aujourd’hui sont au contraire unanimes à penser

qu’aucune fonction d’Eglise ne peut se légitimer par référence

à Jésus. Les structures actuelles de l’Eglise sont

le résultat de processus historiques sur lesquels des influences

politiques ont joué et les modèles démocratiques

des débuts n’ont pas pu subsister. La théologienne

américaine bien connue, Rosemary Radford Ruether, n’at-

elle pas écrit, il y a déjà plus de dix ans, dans le journal

des pères jésuites suisses : « Le gouvernement de l’Eglise

est une construction historique, influencée par des systèmes

politiques existants, et ne peut pas être considéré

comme voulu par Dieu.» (Orientierung N°50, 1986, p.141)

Et on pourrait ainsi poursuivre les citations.

On voit bien l’intérêt de l’institution ecclésiastique à

perpétuer son influence sur la société à travers le pouvoir

qu’elle a toujours cherché à exercer sur les consciences.

Mais on doit à la vérité de reconnaître que, malgré

tous les efforts qu’elle a déployés dans ce sens,

l’Eglise n’aurait jamais pu atteindre son but et en tout cas

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préserver sa domination aussi longtemps, si elle n’avait

bénéficié de la complicité passive du peuple. Ni les prophètes,

ni Jésus, le Christ, n’ont voulu de telles choses.

Dans ces conditions, il faut bien reconnaître que c’est le

peuple lui-même qui a permis qu’il en soit ainsi.

Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il est bien plus

facile de se confesser à un prêtre pour obtenir l’absolution

de ses péchés que d’aller soi-même vers son prochain

pour lui avouer ses torts et lui en demander pardon.

En quelque sorte, on pourrait dire que le prêtre fait

le travail à notre place et qu’ainsi il nous est possible

d’accéder au ciel à moindre effort ! C’est purement et

simplement de la superstition et celle-ci est toujours en

vigueur aujourd’hui !

Si le pouvoir des prêtres s’appuie en effet sur cette

tendance à la passivité et au moindre effort, il n’en est

pas moins vrai également que celle-ci a été fortement

encouragée et renforcée par l’usage de la menace et de

la peur.

Lorsque Jésus de Nazareth a enseigné le Dieu de

l’amour et quand il a dit que celui-ci se trouve en chacun

de nous, beaucoup d’hommes et de femmes ont été

malgré tout très touchés par ce message d’espérance.

Cela a soulevé l’enthousiasme de beaucoup et réveillé

en eux l’aspiration à la liberté et à la vérité. De tout temps

des hommes et des femmes sincères ont ressenti cet

69

appel. Pour ceux-là qui avaient la prétention de s’éveiller

de la léthargie dans laquelle on voulait les maintenir, il a

fallu user d’autres méthodes : celles de l’intimidation et

de la menace spirituelle. « Si tu refuses de nous écouter

et de nous suivre, tu finiras en enfer ». « Si tu ne fais

pas ce que nous t’ordonnons, tu ne parviendras jamais

jusqu’à Dieu. »

Et pour ceux qui persistaient à rester dans l’erreur,

on n’hésita pas à recourir, à la force et à la contrainte

physique. Que n’aurait-on fait pour « sauver leur âme ».

Dieu a-t-il vraiment parlé selon les

paroles qu’on prête à Moïse ?

Selon l’Ancien Testament, le non-respect

des lois religieuses est puni

de la peine de mort.»

Comme indiqué plus haut, il convient donc d’approcher

les livres attribués à Moïse, à savoir le Pentateuque, avec

la plus grande prudence, en gardant sans cesse à l’esprit

que ceux-ci sont l’oeuvre de la caste des prêtres qui, selon

l’expression du professeur, Walter Nigg, théologien

allemand réformé, sont « l’ennemi naturel du prophète ».

Ainsi, en parcourant le Pentateuque il faudrait toujours se

demander : Dieu a-t-il pu tenir de tels propos à Moïse ?

Les passages ci-après, reproduits à titre d’exemple, constituent

à eux seuls la démonstration qu’il n’en est rien.

70

Ainsi, dans Exode (Ex 28, 1-4) on peut lire : « Fais

approcher de toi Aaron, ton frère, et ses fils, et prendsles

parmi les enfants d’Israël pour les consacrer à mon

service dans le sacerdoce : Aaron et les fils d’Aaron,

Nadab, Abihu, Éléazar et Ithamar. Tu feras à Aaron, ton

frère, des vêtements sacrés, pour marquer sa dignité et

pour lui servir de parure. Tu parleras à tous ceux qui sont

habiles, à qui j’ai donné un esprit plein d’intelligence ; et ils

feront les vêtements d’Aaron, afin qu’il soit consacré et

qu’il exerce mon sacerdoce. Voici les vêtements qu’ils

feront : un pectoral, un éphod, une robe, une tunique brodée,

une tiare, et une ceinture. Ils feront des vêtements

sacrés à Aaron, ton frère, et à ses fils, afin qu’ils exercent

mon sacerdoce. » et un peu plus loin Exode (Ex 28,6-

14) « Ils feront l’éphod d’or, de fil bleu, pourpre et cramoisi,

et de fin lin retors ; il sera artistement travaillé. On y fera

deux épaulettes, qui le joindront par ses deux extrémités ;

et c’est ainsi qu’il sera joint. La ceinture sera du même

travail que l’éphod et fixée sur lui ; elle sera d’or, de fil

bleu, pourpre et cramoisi, et de fin lin retors. Tu prendras

deux pierres d’onyx, et tu y graveras les noms des fils

d’Israël, six de leurs noms sur une pierre, et les six autres

sur la seconde pierre, d’après l’ordre des naissances.

Tu graveras sur les deux pierres les noms des fils d’Israël,

comme on grave les pierres et les cachets ; tu les entoureras

de montures d’or. Tu mettras les deux pierres sur

les épaulettes de l’éphod, en souvenir des fils d’Israël ; et

71

c’est comme souvenir qu’Aaron portera leurs noms

devant l’Éternel sur ses deux épaules. Tu feras des

montures d’or, et deux chaînettes d’or pur, que tu

tresseras en forme de cordons ; et tu fixeras aux montures

les chaînettes ainsi tressées. » Et encore, dans Exode

(Ex 28, 31-35) « Tu feras la robe de l’éphod entièrement

d’étoffe bleue. Il y aura, au milieu, une ouverture pour la

tête ; et cette ouverture aura tout autour un bord tissé,

comme l’ouverture d’une cotte de mailles, afin que la robe

ne se déchire pas. Tu mettras autour de la bordure, en

bas, des grenades de couleur bleue, pourpre et cramoisie,

entremêlées de clochettes d’or : une clochette d’or et

une grenade, une clochette d’or et une grenade, sur tout

le tour de la bordure de la robe. Aaron s’en revêtira pour

faire le service ; quand il entrera dans le sanctuaire devant

l’Éternel, et quand il en sortira, on entendra le son des

clochettes, et il ne mourra point.»

Qui peut croire que Dieu se soucie d’un tel luxe et

aspire à tant de pompe pour être honoré. Et comment

imaginer qu’il réclame la mort de tout homme qui ne respecterait

pas ces instructions.

Là encore, la logique se heurte à un problème de

taille : comment le Dieu qui s’exprime à travers Moïse

pourrait-Il à la fois demander la mort et par ailleurs exprimer

le Commandement contraire, à savoir : « Tu ne

tueras pas ! »

72

Les préceptes de l’Eglise en matière d’habits

sacerdotaux et de rites liturgiques sont inspirés

de l’Ancien Testament.

Paroles de Jésus, le Christ, à propos des

pharisiens et des docteurs de la loi. Jérémie

avait prophétisé la falsification des écritures

Les vêtements sacerdotaux revêtus par les cérémoniaires

lors des célébrations religieuses, particulièrement

au sein de l’Eglise catholique, sont très proches de ceux

décrits dans l’Ancien Testament et trouvent leur origine

dans le paganisme. Ainsi, on peut lire dans la Bible (Ex

28, 36-38) : « Tu feras une lame d’or pur, et tu y graveras,

comme on grave un cachet : Sainteté à l’Éternel. Tu l’attacheras

avec un cordon bleu sur la tiare, sur le devant de la

tiare. Elle sera sur le front d’Aaron ; et Aaron sera chargé

des iniquités commises par les enfants d’Israël en faisant

toutes leurs saintes offrandes ; elle sera constamment sur

son front devant l’Éternel, pour qu’il leur soit favorable. »

De même, l’utilisation d’huiles saintes telle que le rapporte

l’Ancien Testament, rappelle tout à fait la ‘sainte

onction’ pratiquée encore de nos jours. Voici ce qu’on

peut lire dans le Lévitique (Lv 8, 11-12) : « Il en fit sept

fois l’aspersion sur l’autel, et il oignit l’autel et tous ses

ustensiles, et la cuve avec sa base, afin de les sanctifier.

Il répandit de l’huile d’onction sur la tête d’Aaron, et

l’oignit, afin de la sanctifier. »

73

Cela rappelle encore certains rituels toujours en

vigueur de nos jours et pratiqués lors de l’inauguration

d’une église ou à l’occasion de l’intronisation dans leurs

fonctions d’un prêtre, d’un évêque ou d’un Pape. A cet

égard, les directives à respecter sont extrêmement

précises et pour tout dire, aussi incompréhensibles que

celles dont nous parle l’Ancien Testament.

Mais qu’a dit Jésus à propos du culte et de tout ce qui

s’y rattache ?

En substance, il a dit : Tu es le temple de l’Esprit-Saint.

Orne ton âme de la parure de la vertu, avec de bonnes

pensées, des pensées qui correspondent à la volonté

de Dieu. Vis selon les Dix Commandements de Dieu et

conforme-toi aux Lois de la vie - par exemple au Sermon

sur la Montagne - que J’ai apportées aux hommes,

mais il n’a jamais évoqué la nécessité de se conformer

à des rites ni de s’en remettre à quiconque, et donc à un

prêtre.

C’est d’ailleurs ce langage qu’ont toujours tenu les vrais

prophètes. Ainsi, Jérémie s’exprime-t-il de la façon suivante

dans l’Ancien Testament: « Comment pouvezvous

dire : ‘Nous sommes sages, la loi de l’Éternel est

avec nous’ ? C’est bien en vain que s’est mise à l’oeuvre

la plume mensongère des scribes. » (Jr 8, 8).

Les grands prophètes se sont toujours élevés contre

la falsification et la confiscation par les prêtres de la Parole

de Dieu. L’Ancien Testament fourmille de tels pas74

sages qui, depuis le temps, devraient avoir ouvert les

yeux de beaucoup.

On pourrait mettre en parallèle le côté théâtral adopté

par les prêtres, entre autres la mise en scène vestimentaire

des cérémonies religieuses, avec cette phrase de

Jésus rapportée dans l’évangile de Matthieu : « Toutes

leurs actions, ils les font pour se faire remarquer des

hommes. Ils élargissent leurs phylactères et allongent

leurs franges. Ils aiment à occuper les premières places

dans les dîners. Ils aiment à être salués sur les

places publiques et à s’entendre appeler « maître » par

les hommes. » (Mt 23, 5-7) On peut également rappeler

ce passage que nous avons déjà cité : «…ne vous

faites pas appeler maître car vous n’avez qu’un seul

maître et vous êtes tous frères. N’appelez personne

sur la Terre votre Père car vous n’en avez qu’un seul,

le Père céleste. » (Mt 23, 8) qui témoigne que Jésus a

toujours prêché en faveur de l’égalité et non pour l’instauration

d’une hiérarchie de prêtres et de fonctionnaires

écclésiastiques.

Il a dit « Suivez-Moi ! » (Mt 4, 19), c’est-à-dire suivez

le Christ en vous car Il est le chemin, la vérité et la vie,

mais n’a jamais demandé aux hommes de s’en remettre

à d’autres hommes .

75

Quand l’Ancien Testament parle des sacrifices

comme d’ «... une odeur agréable à l’Eternel ...»

Jésus est toujours intervenu en faveur

des animaux

Il y a 2000 ans, Jésus nous a dit ce qu’il pensait des

holocaustes et autres formes de sacrifices d’animaux.

Ce sont, bien sûr, les écrits apocryphes qui nous

renseignent le mieux à ce sujet. Ceux que la rage destructrice

des autorités de l’Eglise a épargnés nous montrent

un Jésus préoccupé tout aussi bien du salut des

hommes que du sort des animaux, un Jésus plein d’amour

et de compassion, n’hésitant pas à s’opposer aux mauvais

traitements qu’on leur inflige. Pour tout chrétien de

coeur, cela ne fait d’ailleurs aucun doute tant il est vrai

que l’amour est indivisible. Comme l’a dit Lamartine : « On

n’a pas deux coeurs, l’un pour les hommes et l’autre pour

les animaux ; on a un coeur ou on n’en a pas. » Dans ces

conditions, comment imaginer que Jésus ait pu ignorer le

sort de ces créatures innocentes. Le mépris majuscule

dont l’Eglise a toujours fait preuve à leur égard ne saurait

empêcher les hommes de coeur de percevoir où se trouve

la vérité.

Pour autant, le Nouveau Testament – c’est-à-dire les

documents qui ont eu l’heur de plaire aux autorités spirituelles

de l’Eglise naissante – laisse transparaître ici

ou là des informations sur la nature des rapports que

76

Jésus entretenait avec les animaux. Ainsi, on nous

apprend que dans le désert où il s’était retiré 40 jours,

Jésus vécut entouré d’animaux sauvages qui lui tenaient

compagnie. Un autre passage célèbre décrit la façon

dont Jésus libéra les animaux amenés au temple pour

y être vendus dans le but d’être sacrifiés.

A l’inverse, voici comment s’expriment les prêtres dans

l’Ancien Testament : « Si son offrande est un holocauste

de gros bétail, il offrira un mâle sans défaut ; il l’offrira à

l’entrée de la tente d’assignation, devant l’Éternel, pour

obtenir sa faveur. Il posera sa main sur la tête de l’holocauste,

qui sera agréé de l’Éternel, pour lui servir d’expiation.

Il égorgera le veau devant l’Éternel ; et les sacrificateurs,

fils d’Aaron, offriront le sang, et le répandront

tout autour sur l’autel qui est à l’entrée de la tente d’assignation.

Il dépouillera l’holocauste, et le coupera par morceaux.

Les fils du sacrificateur Aaron mettront du feu sur

l’autel, et arrangeront du bois sur le feu. Les sacrificateurs,

fils d’Aaron, poseront les morceaux, la tête et la graisse,

sur le bois mis au feu sur l’autel. Il lavera avec de l’eau

les entrailles et les jambes ; et le sacrificateur brûlera le

tout sur l’autel. C’est un holocauste, un sacrifice consumé

par le feu, d’une odeur agréable à l’Éternel. » (Lv 1, 3-9)

« Une odeur agréable à l’Eternel », voilà des termes

qui rappellent étrangement le paganisme dont l’un des

aspects essentiels consistait justement dans le fait

d’apaiser l’humeur des dieux.

77

Et cela se poursuit avec force détails plus terribles

les uns que les autres pour se conclure ainsi : « ce fut

l’holocauste, ce fut un sacrifice consumé par le feu, d’une

agréable odeur à l’Éternel, comme l’Éternel l’avait ordonné

à Moïse. » (Lv 8, 21)

Plus loin encore, vient une description sur la manière

de sacrifier une tourterelle ou un pigeon : « Le sacrificateur

sacrifiera l’oiseau sur l’autel ; il lui ouvrira la tête avec

l’ongle, et la brûlera sur l’autel, et il exprimera le sang

contre un côté de l’autel. » (Lv 1, 15)

Comme indiqué plus haut, en aucun cas ces horreurs

ne peuvent être imputées à Moïse et encore moins à

Dieu. Elles ont été introduites par la caste des prêtres,

bien après Moïse.

En effet, comment le Dieu de la Génèse pourrait-il

s’exprimer de la sorte après avoir dit : « Voici, je vous

donne toute herbe portant de la semence et qui est à la

surface de toute la terre, et tout arbre ayant en lui du fruit

d’arbre et portant de la semence : ce sera votre nourriture.

Et à tout animal de la terre, à tout oiseau du ciel, et à

tout ce qui se meut sur la terre, ayant en soi un souffle de

vie, je donne toute herbe verte pour nourriture. Et cela fut

ainsi. Dieu vit tout ce qu’il avait fait et voici, cela était très

bon. Ainsi, il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le

sixième jour. » (Gn1, 29-31)

Rappelons une nouvelle fois que peu de temps avant

d’avoir prétendument prononcé ces paroles, Dieu a

78

donné à Moïse les Dix Commandements, parmi lesquels

se trouve le fameux : « Tu ne tueras pas ! »

Pour le Saint-Siège, Ancien et Nouveau

Testaments sont « la vraie parole de Dieu ».

Le Dieu de l’Ancien Testament est un Dieu

païen et cruel

La raison pour laquelle Dieu, notre Père éternel, a

envoyé le Christ, Son Fils, vers les hommes ressort clairement

de ce qui vient d’être dit plus haut. Il fallait

absolument mettre un terme à ces rituels tout droit issus

du paganisme et qui relèvent de la magie. En effet, ces

pratiques éloignent et détournent les hommes de Dieu,

les empêchant d’accéder à la vie spirituelle véritable, la

vie intérieure. Ainsi, l’enseignement que Jésus délivra aux

hommes de son temps et de ceux à venir, permit d’enrailler

ces dérapages. En effet, Jésus s’est toujours positionné

clairement contre la caste des prêtres, qui utilise

Dieu à ses propres fins.

Sans doute certains penseront-ils que tout cela appartient

au passé. Nous leur conseillerons de s’intéresser de

plus près à ce que la caste des prêtres affirme aujourd’hui

encore officiellement. Ainsi, sait-on que pour l’Eglise :

« L’Ancien Testament avait pour principale raison d’être

de préparer l’avènement du Christ sauveur du monde ».

Comment convient-il d’interpréter une telle affirmation ?

79

Pour l’Eglise catholique, le « Pentateuque » constituerait

la véritable parole de Dieu au même titre que l’enseignement

de Jésus. Ainsi, le Dieu de l’amour côtoieraitil

celui de la haine et de la vengeance sans le moindre

problème.

Rappellons ici ce que ce Dieu aux multiples visages

est capable de dire : « Quand un homme insulte son père

ou sa mère, qu’il soit mis à mort » (Lv 20, 9) ou encore

« Quand un homme commet l’adultère avec la femme de

son prochain, qu’ils soient mis à mort, l’homme adultère

aussi bien que la femme adultère. » (Lv 10,13) et encore

« Quand un homme couche avec un homme comme on

couche avec une femme, ce qu’ils ont fait tous les deux

est une abomination ; qu’ils soient mis à mort. » (Lv 10,

15), etc…

Et pour citer un passage du Deutéronome: « Lorsqu’un

homme a un fils rebelle et révolté, qui n’écoute ni

son père ni sa mère, s’ils lui font la leçon et qu’il ne les

écoute pas, alors son père et sa mère s’empareront de

lui et l’amèneront aux anciens de sa ville, à la porte de

sa localité. Ils diront aux anciens : « Voici notre fils, un

rebelle et un révolté, qui ne nous écoute pas ; il s’empiffre

et il boit ! » Tous les hommes de sa ville le lapideront,

et il mourra. » (Dt 21, 18-21)

Et ceci constitue une infime partie des prescriptions

toutes plus cruelles et monstrueuses les unes que les

autres, dont cet ouvrage regorge.

80

On pourra bien sûr rétorquer que ces récits correspondent

à une époque maintenant révolue et qu’ils n’ont

plus désormais qu’un intérêt historique. A ceux qui avanceraient

ce point de vue, nous serions au regret d’apprendre

qu’ils sont mal informés et que l’Eglise elle-même

réfute cet argument ! En effet, en 1965, lors du célèbre

Concile Vatican II au cours duquel l’Eglise est sensée

avoir pris un tournant décisif vers la modernité, il fut

décidé ( à lire dans le chapitre du cathéchisme de l’Eglise

catholique ayant pour titre : La Sainte Écriture dans la

vie de l’Eglise) : L’Ancien Testament est une partie

inamissible de l’Écriture Sainte. Ses livres sont divinement

inspirés et conservent une valeur permanente (cf.

DV 14) car l’Ancienne Alliance n’a jamais été révoquée.

En effet, « l’Economie de l’Ancien Testament avait pour

principale raison d’être de préparer l’avènement du

Christ Sauveur du monde ». « Bien qu’ils contiennent

de l’imparfait et du provisoire », les livres de l’Ancien

Testament témoignent de toute la divine pédagogie de

l’amour salvifique de Dieu : « En eux se trouvent de

sublimes enseignements sur Dieu, une bienfaisante

sagesse sur la vie humaine, d’admirables trésors de

prière ; en eux enfin se tient caché le mystère de notre

salut » (DV 15).

Les Chrétiens vénèrent l’Ancien Testament comme

vraie Parole de Dieu. L’Eglise a toujours vigoureusement

repoussé l’idée de rejeter l’Ancien Testament sous

81

prétexte que le Nouveau l’aurait rendu caduc (Marcionisme).

L’Eglise, déjà aux temps apostoliques (cf. 1 Co

10, 6. 11 ; He 10, 1 ; 1 P 3, 21), et puis constamment

dans sa tradition, a éclairé l’unité du plan divin dans les

deux Testaments grâce à la typologie. Celle-ci discerne

dans les oeuvres de Dieu dans l’Ancienne Alliance des

préfigurations de ce que Dieu a accompli dans la plénitude

des temps, en la personne de son Fils incarné.

Toute l’Écriture divine n’est qu’un seul livre, et ce seul

livre c’est le Christ, « car toute l’Écriture divine parle du

Christ, et toute l’Écriture divine s’accomplit dans le

Christ » (Hugues de Saint Victor, De arca Noe 2, 8 : PL

176, 642 ; cf. ibid. 2, 9 : PL 176, 642-643: PL 176, 642C).

On aura du mal à l’admettre, mais pour l’Eglise, toutes

les atrocités contenues dans l’Ancien Testament

sont le produit de l’Esprit-Saint.

Enormes contradictions entre l’enseignement

de l’Eglise et celui de Jésus. Pour camoufler

son inclination pour l’Ancien Testament,

l’Eglise abuse du nom de «Jésus-Christ »

Jésus a pourtant enseigné tout autre chose.

Dans ces conditions, la question suivante se pose :

pourquoi, deux mille ans après sa venue, existe-t-il aujourd’hui

encore une caste de prêtres agissant dans l’esprit

de l’Ancien Testament ?

82

Dieu a-t-il envoyé Son Fils sur la Terre pour rien ou

pour le seul profit de la caste des prêtres d’aujourd’hui

qui utilisent le nom de « Jésus » comme autrefois ils se

servaient de celui de « Moïse » pour faire valoir leurs

conceptions et leurs intérêts ?

Comment ne pas remarquer à travers toutes ces

contradictions le fossé existant entre le Dieu cruel de

l’Ancien Testament et celui profondément aimant dont

parle Jésus tout au long de son enseignement ?

Dans le Sermon sur la Montagne - connu aussi sous

le terme de « Béatitudes » - que nous révèle l’Evangile

de Matthieu, Jésus s’exprime ainsi :

«Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des

cieux leur appartient !

Heureux les affligés, car ils seront consolés !

Heureux les débonnaires, car ils hériteront la terre !

Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils

seront rassasiés !

Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde

!

Heureux ceux qui ont le coeur pur, car ils verront

Dieu !

Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront

appelés fils de Dieu !» (Mt 5, 3-9)

Et un peu plus loin, voilà ce qu’il dit à propos de la

prière : «Lorsque vous priez, ne soyez pas comme les

83

hypocrites, qui aiment à prier debout dans les synagogues

et aux coins des rues, pour être vus des hommes.

Je vous le dis en vérité, ils reçoivent leur récompense.

Mais quand tu pries, entre dans ta chambre, ferme ta

porte, et prie ton Père qui est là dans le lieu secret ; et ton

Père, qui voit dans le secret, te le rendra.» (Mt 6, 5-6)

Et les autres passages de cet évangile, ci-après,

auraient dû depuis longtemps faire réfléchir ceux qui se

prétendent les représentants de Dieu sur Terre et les

amener à se remettre en question : « Quiconque s’élèvera

sera abaissé, et quiconque s’abaissera sera

élevé. » (Mt 23,12) Et que dit Jésus concernant la caste

des prêtres ? « Mais vous, ne vous faites pas appeler

Rabbi ; car un seul est votre Maître, et vous êtes tous

frères. Et n’appelez personne sur la terre votre père ;

car un seul est votre Père, celui qui est dans les cieux »

(Mt 23, 8-9) et plus loin encore : « Malheur à vous, scribes

et pharisiens hypocrites ! parce que vous courez la

mer et la terre pour faire un prosélyte ; et, quand il l’est

devenu, vous en faites un fils de la géhenne deux fois

plus que vous. Malheur à vous, conducteurs aveugles !

qui dites : Si quelqu’un jure par le temple, ce n’est rien ;

mais, si quelqu’un jure par l’or du temple, il est engagé. »

(Mt 23,15-16)

Enfin, dans Matthieu (Mt 23, 13), on peut lire également

: « Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites

! Parce que vous fermez aux hommes le royaume

84

des cieux ; vous n’y entrez pas vous-mêmes, et vous

n’y laissez pas entrer ceux qui veulent entrer.»

Après avoir pris connaissance de ces propos – et

les gens d’Eglise les connaissent mieux que quiconque

- comment peut-on encore affirmer que « Ces livres

(l’Ancien Testament) sont divinement inspirés et conservent

une valeur permanente car l’Ancienne Alliance

n’a jamais été révoquée… En effet, « l’Economie de l’Ancien

Testament avait pour principale raison d’être de

préparer l’avènement du Christ Sauveur du monde » ?

Qui était Jésus ?

De quel milieu venait-il ?

Jésus, fils de Marie et Joseph est né dans un milieu

simple et modeste. Jésus était issu de la lignée de David

et de la tribu de Juda. D’un point de vue symbolique,

ceci est particulièrement intéressant car cela signifie que

Jésus n’aurait jamais pu devenir prêtre, ceux-ci étant

issus exclusivement de la tribu de Lévi et devant par

ailleurs, descendre d’Aaron. Jésus ne remplissait donc

aucune de ces deux conditions. Jésus, le Fils de Dieu,

avait choisi de naître au sein du peuple, d’être un homme

du peuple.

En tant que tel, il n’était donc pas prisonnier du carcan

de la tradition et il a ainsi pu transmettre un enseignement

libre, non doctrinal, et porter à la connaissance

de tous les merveilleuses lois de la vie qui sont à l’opposé

des rites et des dogmes rigides de l’institution.

85

Les chrétiens des origines se sont donnés pour tâche

de rappeler cette vérité à tous ceux qui sont prêts à

l’entendre, de sorte que toute confusion soit levée et

que chacun soit en mesure de reconnaître que les institutions

qui ont endossé le manteau « chrétien » et qui

affirment être les représentantes de son enseignement,

n’ont absolument rien de commun avec le véritable enseignement

de Jésus de Nazareth.

86

87

Cette série d’articles repose, à l’origine, sur un cycle

d’émissions de radio intitulées également : Pour les

esprits critiques : Qui se cache derrière le « Saint-

Siège » ? Dans le cadre de cette diffusion, de nombreux

auditeurs nous ont écrit pour nous demander des

explications, des précisions sur tel ou tel sujet. Dans ce

chapitre, nous avons reproduit ces questions ainsi que

les réponses qui leur ont été apportées car elles sont

susceptibles d’intéresser les lecteurs.

Jésus et les premiers chrétiens étaient-ils végétariens

?

Question :

« Je suis végétarienne, mais lorsque j’aborde ce sujet

avec mes amis, ils me rétorquent souvent que la Bible

ne mentionne nulle part que Jésus n’aurait pas mangé

de viande. Comment cela se fait-il ? Par ailleurs, vous

affirmez que Dieu n’a jamais voulu que les hommes

A consulter :

Quelques thèmes édifiants

88

pratiquent les holocaustes décrits dans l’Ancien Testament

et aussi que Jésus était contre le fait de tuer les

animaux. Y-a-t-il des références écrites à ce sujet ? »

Réponse :

On ne peut pas vraiment répondre à cette question

si on fait l’impasse sur un aspect fondamental, méconnu

de la plupart des gens, à savoir que les textes et documents

auxquels nous nous référons aujourd’hui – en

l’occurrence, il s’agit de la Bible – ont une histoire, un vécu

pourrait-on dire. Ils ont été façonnés au cours des siècles

en fonction des impératifs recherchés par ceux qui en

étaient dépositaires. C’est l’un des objectifs de cette série

de rappeler cette histoire et de révéler les buts ayant

présidé aux choix rédactionnels. Ainsi, la Bible, telle que

nous la connaissons aujourd’hui, a connu une élaboration

très longue qui s’est faite d’ajouts successifs mais

aussi de rejets.

Un moment essentiel de cette histoire s’est déroulé

au 4ème siècle de notre ère. Il s’agit du travail de traduction

de la Bible effectué par Jérôme, un clerc de l’Eglise,

à la demande du pape Damase. En effet, il circulait alors

plusieurs versions de la Bible assez éloignées les unes

des autres et le pape en question souhaitait assainir

cette situation. Jérôme qui était connu pour ses talents

de traducteur effectua donc ce travail colossal qui lui prit

plusieurs années. Il traduisit tout d’abord les Evangiles à

89

partir de la version latine existante qu’il estimait la moins

dénaturée et se référa, là où il eut des doutes sur le sens,

à une version grecque sensée être moins altérée.

Pour traduire l’Ancien Testament, Jérôme s’appuya

sur la version en hébreu afin de retrouver ce qu’il appelait

« la vérité hébraïque » de l’Ancien Testament. Son

travail de traduction ayant donné satisfaction aux autorités

de l’Eglise, il reçut leur imprimatur, et c’est cette

version qui fit référence jusqu’au 15ème siècle sous le

nom de Vulgate.

Jérôme qui disposait d’un grand savoir, n’était néanmoins

pas à l’abri de contradictions, la plus importante

étant celle qui mettait aux prises sa fidélité envers l’Eglise

dont il était membre et sa probité intellectuelle. En effet,

dans le cadre de son étude des plus anciennes versions

de la Bible, il fut amené à découvrir des aspects qui avaient

été rejetés et ne figuraient plus dans les versions suivantes.

Il n’est pas question de discuter ici de la façon dont

Jérôme résolut ces contradictions avec plus ou moins de

succès et d’honnêteté intellectuelle, mais cela apporte un

éclairage très instructif sur ce que nous considérons aujourd’hui

comme des vérités immuables mais qui en fait

ne l’ont jamais été. Parmi ces dernières, celle qui se rapporte

aux relations de Jésus avec les animaux est une

des plus importantes et déterminantes car elle pose la

question du statut de l’homme dans la création. Ainsi,

90

pour répondre à la question du végétarisme, voilà ce

que l’on peut lire sous la plume de Jérôme lui-même,

dans une lettre polémique connue en français sous le

titre de « Contre Jovinien » (Adversus Jovinianum) : « Jusqu’au

déluge la consommation de chair animale était inconnue,

mais depuis le déluge on nous a gavé la bouche

des fibres et du jus puant de la chair animale. Jésus-

Christ qui est apparu quand les temps furent accomplis,

a relié la fin avec le commencement, de sorte qu’il

ne nous est plus permis de manger de la viande. »

A la lecture de cette phrase, il ressort très clairement

que, selon Jérôme, l’un des meilleurs, sinon le meilleur,

spécialiste de la Bible de son temps, Jésus aurait enseigné

de ne pas manger de viande.

On pourrait encore éclairer ce thème sous un autre

aspect historique. Pour ceux de nos lecteurs qui ne le

savent pas, la Bible « officielle » résulte d’un choix humain

et arbitraire puisque certains textes ont été jugés

dignes d’y figurer et d’autres non. Pourquoi ? En fonction

de quels critères ? Sans vouloir attribuer une volonté

machiavélique à tous ceux qui ont effectué ces

choix, on est en droit de considérer qu’ils ont souvent

relevé d’un parti pris idéologique, à savoir qu’on a conservé

les documents qui légitimaient une certaine vision

du christianisme en voie d’institutionnalisation et

rejeté tous ceux qui pouvaient s’y opposer. Or, il semble

bien qu’une ligne de fracture importante réside pré91

cisément dans la question des animaux. La plupart des

documents, évangiles et autres, qui ont été mis à l’index

accordent une grande importance à cet aspect. De nombreux

écrits apocryphes confirment non seulement que

Jésus aimait les animaux mais aussi et surtout que la

venue du Christ sur la Terre, la Bonne nouvelle qu’il a

apportée au monde ne concerne pas que les hommes

mais la Terre entière, y compris le monde animal. Le fait

que Jésus et ses apôtres étaient végétariens découle en

toute logique de cette vision unifiée du monde.

Pourquoi Jérôme a-t-il laissé figurer dans la

Bible des passages qui témoignent du vrai

visage du Saint-Siège ?

Question :

Dans la 1ère émission de votre série (il s’agit ici du 1er

chapitre de ce livre), vous avez cité un passage de

l’Apocalypse dans lequel Jean incite fortement le

peuple à quitter l’Eglise. Comment se fait-il qu’un tel

passage ait été conservé dans la Bible alors que

l’Eglise en a falsifié tant d’autres ?

Que signifie sortir de l’Eglise ? Que faut-il faire pour

cela ?

Réponse :

Le passage auquel vous faites allusion se trouve

dans l’Apocalypse de Jean (Ap 18, 4) : « Sortez de cette

92

cité, ô mon peuple, de peur de participer à ses péchés,

et de partager les fléaux qui lui sont destinés. »

Généralement, on l’interprète en effet comme une

invitation à quitter Babylone, la prostituée, identifiée au

cours des siècles à l’Eglise qui s’est bâtie sur le cadavre

du christianisme des origines qu’elle avait pris soin

d’anéantir.

La question que vous nous posez est donc de savoir

comment un passage aussi critique envers l’Eglise a pu

échapper à la vigilance des censeurs patentés de l’institution

? En fait, nous le devons en grande partie à Jérôme,

dont nous venons de parler. Comme nous venons

de le voir, Jérôme était un personnage ambigu et complexe.

Il est revenu plusieurs fois sur son travail de traducteur

et sur les difficultés de cette tâche qu’il a essayé

de mener avec un maximum de rigueur. Toutefois,

c’était aussi un homme ambitieux qui savait parfaitement

mesurer les dangers à éviter pour ne pas compromettre

ses projets et sa situation. De plus, il était lui-même

un homme de conviction qui disposait de ses propres

visions et interprétations du christianisme. Son travail

se situe donc à la croisée de toutes ces contradictions.

C’est ainsi qu’il a pu écrire : «Y aura-t-il quelqu’un pour

ne pas me traiter de falsificateur et d’auteur de sacrilèges

lorsqu’il prendra cette Bible entre ses mains, car j’ai

eu la hardiesse d’ajouter certaines choses aux livres anciens,

de transformer d’autres choses ou d’en améliorer

93

le contenu. » (J.P. Migne, Patrologiae cursus completus,

series Graeca – MPG – 29, Sp. 525 ff.)

Jérôme avait donc tout à fait conscience de prendre

des décisions arbitraires, de sa propre autorité.

Pour donner une idée de la complexité du personnage,

il faut savoir que Jérôme nourrissait certaines

ambitions au sein de l’Eglise et qu’il ne lui aurait pas

déplu d’accéder à la responsabilité suprême, celle de

pape, dont il a toujours été très proche, ce qui lui aurait

d’ailleurs permis de faire triompher ses convictions.

Ainsi, après avoir tout d’abord été assez longtemps proche

d’Origène sur le plan des idées, il s’en éloigna par

la suite pour ne pas compromettre son avenir en se faisant

taxer d’hérétique, ce qui l’aurait mis au ban de

l’Eglise et de la société. On sait, en effet, que la pensée

d’Origène, le père du courant gnostique chrétien, était

l’objet de grandes controverses et qu’elle était regardée

d’un oeil de moins en moins favorable et bienveillant par

les autorités de l’Eglise au point que sa doctrine fut condamnée

au concile de Constantinople. Jérôme qui avait

une perception fine de toutes ces subtilités, entreprit de

suivre un chemin de compromis qui lui permit de louvoyer

à sa guise, sans encourir trop de dangers. Son

travail porte la marque de ce positionnement, parfois en

retrait par rapport aux enseignements de Jésus, en particulier

par rapport aux animaux, mais parfois aussi plus

audacieux quand il choisit de laisser figurer dans la Bible

94

des aspects remarquables qui, au cours des siècles,

ont poussé beaucoup de gens à réfléchir à la distance

qui existe entre l’enseignement de Jésus d’une part et

la réalité institutionnelle de l’Eglise d’autre part. Il s’agit

par exemple de passages de la Bible tels que celui où

Jésus indique « …ne vous faites pas appeler maître

» (Mt 23, 8), celui où il exprime que « Celui qui prend

l’épée périra par l’épée. » (Mt 26, 52) ou encore le passage

de l’Apocalypse de Jean qui est à l’origine de cette

question.

En tout état de cause, une chose reste sûre : si Jérôme

a été canonisé par l’Eglise, c’est parce qu’il a globalement

accompli un travail qui donnait satisfaction à

cette dernière. Et, en effet, les « audaces » de Jérôme

dont il est question ci-dessus sont restées largement

circonscrites et ne l’étaient pas au point d’ébranler l’Eglise

et son pouvoir.

Incontestablement, la Vulgate dont Jérôme est le père

est restée un instrument de domination particulièrement

efficace entre les mains expertes des autorités cléricales.

Cela valait bien une reconnaissance en forme

d’auréole.

95

Pour être canonisé par l’Eglise il faut lui avoir

été soumis. En l’occurrence, le fait d’avoir ou

pas été un pécheur ne joue aucun rôle

D’où il ressort la constatation suivante :

Pour être canonisé par l’Eglise catholique, il faut lui

avoir rendu service et donc lui avoir été soumis. Le fait

d’avoir commis ou pas des péchés ne joue aucun rôle.

A l’appui de cette thèse, on pourrait citer de nombreux

exemples, le plus fameux étant celui de l’empereur Constantin,

l’un des tous premiers saints de l’Eglise dont il sera

largement question au chapitre suivant. Il s’agissait d’un

homme extrêmement cruel qui n’hésita pas à faire assassiner

ses plus proches parmi les proches : sa femme,

son fils et ses alliés. Comment un individu aussi peu recommandable

s’est-il vu offrir des ailes de saint : tout simplement

en accordant à l’Eglise de nombreux avantages

et privilèges. Il s’agissait de sa part d’un choix parfaitement

machiavélique et intéressé, mais cela renforça son

pouvoir et il n’eut ainsi qu’à se louer de cette coopération

parfaitement assumée de part et d’autre.

Sortir de l’Eglise :

Comment s’y prendre ?

On nous demande souvent comment s’y prendre pour

quitter l’Eglise ?

96

Réponse :

La démarche peut être différente d’un pays à l’autre.

Il convient donc de se renseigner au cas par cas, toutefois,

à titre d’exemple, nous pouvons indiquer la manière

dont cela se passe en Allemagne où il n’y a pas

de séparation entre l’Eglise et l’Etat.

Il y a lieu de se rendre auprès de l’administration compétente,

remplir un formulaire et, malheureusement, payer

une taxe ! Le fait d’être obligé d’accomplir cette démarche

auprès d’une administration de l’Etat et non de l’Eglise,

montre bien l’imbrication de l’Eglise et de l’Etat dans ce

pays.

La dépense engagée pour une telle démarche est

cependant minime au regard des économies réalisées

par la suite ! De simples calculs montrent en effet qu’une

personne ayant payé des impôts ecclésiastiques toute sa

vie en Allemagne aurait pu aisément, avec cet argent,

financer une retraite confortable ou un logement.

Dans d’autres pays, comme la France par exemple,

il existe des listes de baptême et il est possible d’écrire

à l’évêché de la région où l’on a été baptisé pour demander

que son nom soit effacé de ces listes.

Comment le pouvoir politique a usé de la force

pour imposer au peuple les privilèges des

prêtres ?

97

Question :

« Vous affirmez qu’on trouve dans l’Ancien Testament

des éléments issus du paganisme babylonien.

Sur quoi vos propos sont-ils étayés ? »

Réponse :

L’histoire enseigne que les Israélites (Royaume de

Juda) furent déportés à Babylone en 3 étapes successives

au cours du 6ème siècle avant Jésus-Christ. Là,

ils vécurent en captivité pendant plusieurs générations.

A la prise de Babylone par Cyrus, le roi des Perses, ils

furent autorisés à retourner en Palestine. On estime que

60 000 d’entre eux prirent ainsi le chemin du retour en

Terre promise où l’une de leurs premières réalisations

consista à entreprendre la reconstruction du temple de

Jérusalem que les Babyloniens avaient détruit. C’est

ainsi que dans le livre d’Esdras (Esd 6, 3) on peut lire :

« La première année du roi Cyrus, le roi Cyrus a donné

cet ordre au sujet de la maison de Dieu à Jérusalem :

Que la maison soit rebâtie, pour être un lieu où l’on offre

des sacrifices, et qu’elle ait de solides fondements… »

On le voit, la décision de reconstruire le temple est

couplée avec la perspective d’y pratiquer les holocaustes

d’animaux. Pourtant, à de multiples reprises, dans

l’Ancien Testament, plusieurs prophètes, et parmi les

plus importants, s’expriment clairement contre les pratiques

sacrificielles.

98

A la lecture d’Esdras on ne peut donc que s’interroger

en constatant ces contradictions. Et voici ce que l’on

peut lire encore (Esd 3, 12) : « Cependant maints prêtres,

maints lévites et chefs de famille déjà âgés et qui

avaient vu le premier temple pleuraient très fort tandis

qu’on posait les fondations sous leurs yeux mais beaucoup

d’autres élevaient la voix en joyeuses clameurs. »

Ainsi, les uns clament leur joie quand les autres expriment

leur douleur. Mais pourquoi pleurent-ils ceux qui

ont connu le 1er temple et qui gardent le souvenir du

temps d’avant ? Peut-être souffrent-ils de constater

qu’on est en train d’introduire dans le culte israélite quelque

chose qui n’a rien à voir avec la volonté de Dieu telle

que les prophètes l’ont exprimée ? Et, en effet, il semble

bien que tous n’aient pas approuvé ce qui était en train

de se passer puisque Esdras nous indique (Esd 6, 11) :

« Le premier ordre du Roi Cyrus fut : « Que celui qui

transgresse ces lois soit empalé sur une poutre arrachée

de sa maison et dressée pour cette occasion et

que sa maison soit mise en ruines. »

Mais pourquoi se serait-on opposé aux décisions du

roi si celles-ci avaient exprimé la volonté de Dieu ? Et

pourquoi annoncer des sanctions aussi cruelles si ce

n’est parce qu’une partie du peuple s’opposait à ces décisions

?

Se peut-il que le décret de Cyrus ait eu pour but de

mettre au pas et d’éliminer tous ceux qui connaissaient

99

la volonté de Dieu et son opposition aux sacrifices d’animaux

?

Esdras chargé d’ériger les fondations du nouveau

temple et de retravailler les textes pour leur rendre leur

« pureté » originelle portait une double casquette. Il était

à la fois docteur et scribe, c’est-à-dire prêtre, en même

temps que fonctionnaire de l’empire perse, une sorte de

ministre des affaires juives auprès de l’empereur qu’il

servit avec la plus grande loyauté.

Bien entendu, il convenait de sauver les apparences

et d’apparaître sous le meilleur jour possible et c’est

pourquoi on tente de nous faire croire que c’est le maître

qui mangeait dans la main du serviteur. Ainsi, dans

Esdras (Esd 7, 6) on lit : « Cet Esdras monta de Babylone.

C’était un scribe versé dans la loi de Moïse donnée

par Yahvé, Roi d’Israël. Comme la main de Yahvé,

son Dieu était sur lui, le roi lui accordait tout ce qu’il

demandait. »

A qui voudra-t’on faire croire cela ? En vérité, les

questions qu’il convient de se poser sont les suivantes

: Pourquoi l’empereur l’avait-il choisi ? Pour quelle

mission ? Celle consistant à restaurer la loi de Dieu, à

accomplir Sa volonté ou celle consistant à servir les

intérêts politiques de son mentor. En poussant les juifs

à adopter des coutumes païennes importées de Babylone

– les sacrifices d’animaux – on avait peut-être tout

simplement pour objectif d’en faire des sujets plus doci100

les et fidèles car mieux respectueux des valeurs de l’empire

?

Le fait de reformuler le 5ème Commandement de

« Tu ne tueras pas » en « Tu ne commettras pas

de meurtre » permet de justifier le fait de tuer,

dans « certaines circonstances »

Toute personne sensée ne manquera pas de se demander

par quel détour le Dieu des 10 Commandements

et du célèbre « Tu ne tueras pas » peut également être

celui qui ordonne de telles choses ? Voilà un Dieu bien

peu conséquent et fort versatile qui change d’idée

comme d’autres de chemise. Un tel Dieu ne le serait

pas plus que nous ni vous, chers lecteurs, car il aurait

alors des réactions parfaitement humaines. Mais le Dieu

dont les prophètes et Jésus de Nazareth nous parlent,

lui est divin et absolu.

Pour quelqu’un qui voit les choses ainsi, il n’existe

qu’une hypothèse pour expliquer ces variations dans la

parole de Dieu : on a placé dans sa bouche des paroles

qui ne sont pas les siennes et on lui fait tenir des propos

qu’Il n’a jamais dits. En falsifiant sa parole, on a fait du

Dieu de l’amour et de la vie un dieu cruel et mortifère.

En ce qui la concerne, l’Eglise s’est toujours accordé

le droit d’interpréter l’enseignement de Jésus à sa

guise. Dans le cas du 5ème Commandement, elle a pris

101

très tôt l’habitude de considérer que si celui-ci devait

bel et bien s’appliquer aux individus placés sous sa dépendance,

il ne s’appliquait toutefois pas à elle-même.

Ainsi, tout au long de son histoire, elle a pu légitimer les

croisades, les guerres de conquête, la mise en esclavage

de millions d’individus, leur conversion forcée, l’inquisition,

la chasse aux sorcières, etc…

Pour justifier leur comportement, certains n’hésitent pas

à opérer un petit glissement sémantique. A la suite de nombreux

rabbins, ils prétendent que l’expression « Tu ne tueras

pas » correspondrait à une mauvaise traduction de la

volonté de Dieu et que celle-ci a, en fait, été formulée de la

façon suivante « Tu ne commettras pas de meurtre »*.

On le sait, depuis longtemps, le meurtre est un acte juridiquement

répréhensible et vaut encore la peine de mort à

son auteur, dans beaucoup de pays. Par contre, le fait de

tuer, peut être parfaitement admis dans certaines circonstances

et situations, la guerre étant l’une d’entre elles. Et

l’on a rarement vu l’Eglise s’opposer à l’Etat dans ce domaine.

Au contraire, c’est souvent avec la bénédiction des

autorités ecclésiastiques que les soldats montent au front

et se livrent à toutes sortes d’atrocités et d’exactions sur

les populations civiles. Gott mit uns !**

* Voir par exemple la T.O.B. (Traduction OEucumènique de la

Bible) Ex. 20, 23 et Mt. 5, 21. Editions du Cerf

**« Dieu avec nous » Cette formule a longtemps figuré en

écusson sur le ceinturon des soldats allemands.

102

Dernièrement, lors de la guerre dans l’ex-Yougoslavie,

l’Eglise catholique n’a pas hésité à soutenir activement

les visées militaires de son armée nationale.

L’eucharistie ou la pratique païenne

du sacrifice sanglant

On nous interroge concernant les influences païennes

dans la Bible et sur la façon dont celles-ci se sont

perpétuées dans le christianisme institutionnel :

Question :

« Lors de la seconde émission de la série sur le Saint-

Siège, vous avez longuement expliqué l’importance

des pratiques sacrificielles dans le paganisme. La

façon dont la messe est célébrée encore à notre époque

n’est-elle pas aussi grandement influencée par

des apports païens ?

Réponse :

La personne qui nous pose cette question a parfaitement

raison. On peut même dire qu’à travers sa question,

elle met le doigt sur la plus grande supercherie pratiquée

à l’encontre de l’enseignement de Jésus de Nazareth.

En effet, l’Eglise voit dans la célébration de la

messe, la répétition symbolique du sacrifice par le sang

de Jésus sur la croix. A l’occasion de chaque office reli103

gieux ce sacrifice est de nouveau thématisé et symbolisé à

travers la cérémonie de l’eucharistie : par sa mort, par

son sacrifice, le Christ aurait pris sur lui l’ensemble de

nos péchés. Ainsi, en répétant chaque dimanche ce geste

symbolique, on renouvelle ce sacrifice et on soulage sa

conscience des mauvaises actions commises au cours

de la semaine. Cette conception du bouc émissaire est

incontestablement d’origine païenne. A l’origine, on pratiquait

de véritables sacrifices humains avant de remplacer

les hommes par des animaux, entre autres par le

bouc. Ici, dans la symbolique catholique, on réintroduit le

sacrifice humain, mais pas n’importe lequel, le plus grand

qui soit puisque c’est le Fils de Dieu qu’on sacrifie. C’est

ce qu’a déclaré Paul et c’est le point de vue que l’Eglise

a adopté, qui est encore le sien aujourd’hui et qui le restera

aussi longtemps qu’existera l’Eglise catholique.

Pourtant, Jésus de Nazareth n’est pas venu sur la

Terre avec l’intention d’y mourir sur la croix. Il est venu

pour apporter aux hommes la vérité des Cieux et pour y

ériger le Royaume de Paix. Cette connaissance nous a

été révélée par l’Esprit du Christ lui-même, à notre époque,

par la bouche de son instrument, Gabriele, mais on

la retrouve aussi en partie dans certains passages de

l’Evangile ainsi bien sûr que dans les écrits apocryphes.

Cette pensée du sacrifice par le sang, cette mystique

du sang, pour l’appeler ainsi, a été introduite par

Paul dans ce qui commençait tout juste à se transfor104

mer en christianisme institutionnel. Ainsi, quelqu’un qui

se réclame de cette pensée devrait se définir comme

paulinien plutôt que comme chrétien se situant dans la

filiation du Christ. Ne pas le faire, c’est s’associer à la

plus grande falsification qui soit de l’enseignement de

Jésus, l’enseignement de l’amour, car c’est faire de Dieu

un personnage colérique, brutal et cruel, exigeant le

sacrifice expiatoire de son propre fils et l’envoyant sur

Terre pour cela. On ne peut imaginer d’acte plus cruel

que celui-là !

La guerre : théâtre de sacrifices sanglants.

Soldats sacrifiés pour la patrie.

Quand les obus servent d’instrument pour

exprimer « la grâce de Dieu »

Dès les premiers temps du christianisme, la question

du positionnement chrétien à l’égard de la violence

institutionnelle de la guerre, s’est trouvée posée. Les

premiers chrétiens ont eu à subir les foudres de l’Etat et

ont payé au prix fort leur refus de servir à la guerre, le

plus souvent de leur vie. On peut comprendre qu’un tel

refus était susceptible de mettre à mal tout l’équilibre

des principes sur lesquels reposait – et repose encore

largement – une certaine conception de l’Etat destiné à

l’exercice du pouvoir et à la gestion des intérêts de quelques

individus, familles ou groupes socio-ethniques.

105

C’est pourquoi le comportement résolument pacifiste

des premiers chrétiens généra une riposte impitoyable

et sans merci. L’Eglise d’alors, en cours d’institutionnalisation,

comprit le danger qu’il y avait pour elle à soutenir

ce point de vue au regard de ses intérêts temporels

et condamna le refus de servir dans les armées.

Depuis lors, elle s’est toujours tenue à cette vision

des choses et s’est largement compromise avec toutes

les formes de pouvoir, jusqu’aux plus sanglantes et

autoritaires. Le fait qu’il y ait toujours eu en son sein des

individus nobles, honnêtes, généreux, prêts au sacrifice

désintéressé pour leurs prochains, ne doit pas être

l’arbre qui cache la forêt.

Pour un « juste », combien de compromissions, de

bassesses, d’abominations ?

Lors de la 1ère guerre mondiale, le cardinal allemand

Faulhaber, fêté par la suite comme un grand patriote

par le 3ème Reich déclara, en tant qu’aumônier militaire

que « les canons de guerre sont les instruments d’expression

de la grâce de Dieu » et on sait, sans entrer

dans les détails, de quelle façon l’Eglise, jusqu’à ses

instances les plus élevées, s’est compromise à l’occasion

de ces 2 conflits mondiaux. La déclaration du cardinal

Faulhaber porte en elle la pensée que la guerre

serait une forme de purification lavant et effaçant les

errements du peuple sur le plan moral. Dans cette vision,

le soldat doit donc se sacrifier pour un but élevé.

106

Le plus macabre, dans ce processus, étant que les

aumôniers des deux camps tiennent les mêmes propos

aux soldats qui s’affrontent et s’entretuent donc avec la

bénédiction épiscopale.

Jusqu’à preuve du contraire, cette pensée du sacrifice

sanglant est encore en vigueur au sein de l’Eglise

catholique comme de l’Eglise protestante et elle est purement

païenne, Jésus n’a-t-il pas dit à Pierre : « Celui

qui prend l’épée, périra par l’épée » (Mt 26, 52). La mise

en garde est pourtant parfaitement claire et s’adresse à

chacun sans exception : avoir recours à la violence ne

correspond pas à la volonté de Dieu et celui qui sème la

violence, récoltera la violence.

De plus, il est capital de rappeler que Jésus a prononcé

ces paroles dans un contexte de légitime défense,

sa vie étant menacée. Voilà qui porte un éclairage

intéressant et instructif sur le dernier concept à la

mode au sein de l’Eglise, nous voulons parler de la notion

de guerre « juste » sous couvert de visées humanitaires.

Pourtant, au regard des paroles de Jésus rapportées

dans ce passage de la Bible, il est parfaitement

clair que le point de vue de l’Eglise sur la guerre juste

n’est pas chrétien.

Bien entendu, cela ne signifie en rien qu’il convient de

tout accepter et d’adopter une attitude fataliste devant la

vie et face aux évènements. Au contraire, Jésus nous a

montré de quelle façon nous devrions être actifs cha107

que jour au service des valeurs de paix, de justice, de

bien et d’harmonie, tout d’abord par notre propre comportement

personnel, mais également, le cas échéant

en agissant et en intervenant de façon concrète au service

de nos prochains, hommes ou animaux. Lui-même

l’a fait plus d’une fois et c’est pour cela qu’il est mort.

L’hypocrisie de l’Eglise catholique prend des

formes toujours plus pernicieuses.

Plusieurs papes font officiellement l’éloge de

l’inquisition.

Le génocide perpétré lors de la conquête de

l’Amérique du Sud aurait été « une heureuse

faute » !

A la lecture de ce qui vient d’être dit, nous ne pouvons

manquer de constater à quel point il est difficile et délicat

d’aborder ces aspects tant ils sont entourés d’un

voile épais de mensonges et d’omissions que la patine de

l’histoire s’est chargée de rendre méconnaissables en

effaçant de nos consciences le souvenir de leur portée

et de leurs intentions véritables. De plus, ils sont souvent

si bien camouflés sous un échafaudage de savantes

formules intellectuelles, parfois contradictoires, qu’il est

presque impossible au commun des mortels d’en percevoir

la vraie nature et les véritables signification et portée.

108

En réalité, tout cela n’est pas fortuit mais relève d’une

intention délibérée visant à parer une institution repue

de richesses et de pouvoir temporel, des vertus de la

pauvreté, de la compassion et de l’amour pour les humbles

et les faibles. A titre d’exemple des capacités à la

duplicité de cette institution, on relèvera les récentes

prises de position du pape actuel et de son prédécesseur

contre la recherche sur les embryons, par « respect

de la vie », alors que dans le même temps est théorisée

la « guerre juste », par laquelle les enfants venus

au monde au nom du « respect de la vie » iront la perdre

sur les champs de bataille.

Les évènements survenus récemment, à l’occasion

du décès de Jean-Paul II et de la nomination de son

successeur, nous offrent également un bel aperçu de

cette aptitude à la duplicité.

Le fait que le nouveau pape ait pris pour nom Benoît

XVI provoqua tout d’abord la surprise. On s’attendait à

ce qu’il choisisse de se nommer Jean-Paul III pour marquer

la continuité avec son prédécesseur. Le choix qui

préside au nom d’un nouveau pape élu n’étant jamais

sans signification programmatique, il est utile de rappeler

qui fut Benoît XV qui occupa le trône de Pierre de

1914 à 1922, c’est-à-dire tout au long de la première

guerre mondiale.

109

Benoît XV est souvent qualifié de « pape de la paix »

et le fait que Ratzinger se réclame de son héritage,

donna lieu immédiatement à des commentaires favorables

à son égard dans les cercles libéraux, dans les

milieux intellectuels et dans les médias attachés bien

souvent davantage à la forme qu’au fond : Ce pape affublé

d’une image de conservateur et de rétrograde n’allait-

il pas finalement agréablement nous surprendre ?

Qu’en est-il en réalité ?

En fait, la neutralité affichée par le Vatican durant la

première guerre mondiale et les efforts de Benoît XV

pour obtenir la paix, n’avaient rien à voir avec une opposition

fondamentale à la boucherie généralisée. Ils

étaient bien plutôt motivés par d’autres considérations.

En effet, le Vatican avait compris immédiatement qu’il

ne pouvait qu’être perdant dans tous les cas de figure

par la continuation du conflit et, par conséquent, il avait

intérêt à ce qu’il se terminât au plus tôt. Les puissances

belligérantes - France, Allemagne, Autriche-Hongrie,

Italie - ayant chacune une forte population catholique,

en prenant parti pour l’un ou l’autre camp, le Vatican

risquait une scission de l’Eglise.

Giacomo della Chiesa (Benoît XV) qui fut élu pape

un mois après le début de la guerre était un diplomate

expérimenté. Ce rejeton d’une famille de l’aristocratie

génoise avait passé des années au service de la diplomatie

vaticane. Il resta attaché à la neutralité du Vatican

110

pendant toute la durée de la guerre et, à partir de 1917,

il encouragea même le président américain Wilson à

engager des négociations de paix. Ce faisant, il préservait

autant que faire se peut les intérêts politiques de

l’Eglise tout en gagnant pour l’histoire une image de pacifiste

et de sage.

En se réclamant de ce personnage, Benoît XV effectue

donc à peu de frais une habile opération de communication

susceptible de jeter le trouble parmi les esprits

critiques.

Mais en réalité, Benoît XV a fait bien peu, sinon rien,

de façon concrète pour s’opposer à la guerre. En tant

que plus haute autorité spirituelle et morale de la planète,

pourquoi ne s’est-il pas montré plus ferme ? Pourquoi

n’a-il pas excommunié les personnes qui prenaient

part à la guerre ou qui l’avaient décidée, en leur refusant

le dénominatif de chrétiens ? Pourtant, d’ordinaire

l’Eglise sait très bien s’y prendre quand il s’agit d’exclure

ceux qui ne s’en tiennent pas à son enseignement.

Bien entendu, s’il ne l’a pas fait, c’est qu’il aurait risqué

de s’aliéner les instances dirigeantes des différents pays

belligérants.

Mais pour ceux qui voudraient bien y regarder de

plus près, il y a peut être une autre signification au choix

de son nom par le nouveau pape. En effet, tout comme

le cardinal Ratzinger, Benoît XV fut un adversaire

111

farouche de la « modernité », des Lumières, du

rationalisme, du libéralisme (au sens revêtu par ce mot

à l’époque), de la démocratie et, en définitive, de tout ce

qui semblait remettre en cause les bases du vieux

monde et la place que l’Eglise y occupait.

Dans une lettre encyclique publiée quelques mois

seulement après sa prise de fonction, Benoît XV s’était

opposé avec véhémence à tous ceux qui faisaient

confiance à la compréhension et à la raison : « Enflés et

enorgueillis de leur haute opinion de l’esprit humain,

lequel a fait assurément, avec l’aide de Dieu, des progrès

incroyables dans l’exploration de la nature, certains,

préférant leur propre jugement à l’autorité de l’Eglise, en

sont venus dans leur témérité jusqu’à juger à la mesure

de leur intelligence les divins mystères et toutes les

vérités révélées, n’hésitant pas à les adapter au goût des

temps actuels. Ainsi surgirent les monstrueuses erreurs

du modernisme que, à bon droit, Notre Prédécesseur a

proclamé la synthèse de toutes les hérésies et qu’il a

solennellement condamnées... Nous voulons donc que

reste sacrée cette règle de nos pères : n’innovez en

rien, contentez-vous de la tradition ».*

La lettre «Ad Beatissimi Apostolorum» du 1er novembre

1914 condamnait également la Première guerre mondiale.

Mais comme l’indiquait clairement le texte de la

* Lettre «Ad Beatissimi Apostolorum» du 1er novembre 1914

112

lettre, il s’agissait pour le pape de défendre avant tout

l’ordre existant menacé au plus haut point par les bouleversements

que la guerre était susceptible d’entraîner.

Cette condamnation était motivée avant tout par la

peur de profonds changements sociaux tels qu’il devait

effectivement s’en produire en Russie, en Allemagne,

en Hongrie et ailleurs. De là, la défense énergique des

pouvoirs en place et de l’ordre établi que seule la paix

était en mesure d’assurer.

La lettre en question condamnait également le fait

que « généralement on ne respecte plus l’autorité de ceux

qui commandent » et y voyait « une autre cause des

perturbations sociales ». Elle s’opposait à toute forme

de démocratie : « Du jour en effet où on a voulu placer

l’origine de tout pouvoir humain, non plus en Dieu Créateur

et Maître de l’Univers, mais dans la libre volonté de

l’homme, les liens de subordination qui doivent rattacher

les inférieurs aux supérieurs se sont affaiblis au point

de disparaître ou peu s’en faut. »

Bien entendu, chaque fois que le mot Dieu est prononcé,

c’est le mot Eglise qu’il faut entendre !

Sur un autre sujet, mais toujours dans le même ordre

d’esprit, celui de la duplicité et de la schizophrénie,

il est intéressant de se rappeler que, quelques semaines

seulement avant son élection sur le siège de Saint-

Pierre, le pape nouvellement élu n’a pas hésité à tenir

113

les propos suivants, lors d’une interview à la 1ère chaîne

allemande : « Nous nous plaçons dans la continuité de

l’inquisition. » Et d’ajouter : « On ne peut nier le fait que

l’inquisition ait apporté un certain progrès, puisque lors

des procès, les accusés étaient tout d’abord soumis à

des interrogatoires. »

Comment ne pas qualifier ces propos de cyniques

quand on sait que les interrogatoires auxquels procédaient

les tribunaux de l’inquisition étaient accompagnés

des tortures les plus cruelles et abominables qui soient

et qu’ils coûtèrent la vie à tant de personnes ? Il est

parfaitement incroyable qu’un cardinal, qui plus est directeur

pour la doctrine de la foi, place lui-même son

action dans la continuité de l’inquisition et la présente

comme un progrès au regard des moeurs judiciaires de

l’époque. Que ne dirait-on pas aujourd’hui de quelqu’un

qui oserait qualifier de progrès les méthodes en vigueur

pendant la dictature chilienne ou sous le 3ème Reich, sous

prétexte que les victimes de Pinochet ou d’Hitler auraient

eu droit à un interrogatoire musclé avant d’être assassinées

dans les chambres de tortures ?

Et pourtant, le cardinal qui tenait de tels propos est

devenu pape depuis et bénéficie désormais du titre de

« Saint-Père ». Ainsi se perpétue la formule : « Approuve

le fait de tuer, approuve les massacres mais surtout

sois un bon serviteur de l’Eglise, alors tu es déjà un

saint. »

114

Bien sûr diront certains, tout cela est vrai, cependant

il ne s’agit que d’un épiphénomène qu’il convient

de savoir replacer dans son contexte pour en saisir la

véritable portée. C’est sans doute ce qu’a voulu faire le

défunt pape Jean-Paul II - que beaucoup souhaitent déjà

voir canonisé - lorsque, à l’occasion du 500ème anniversaire

de l’évangélisation de l’Amérique du Sud, il a déclaré

que la prise de possession de celle-ci par les conquérants

catholiques espagnols – et plus tard portugais

– avait eu certes un caractère violent condamnable,

mais qu’il s’agissait aussi d’une « évangélisation remarquable

» ayant véritablement contribué au « développement

de l’histoire du salut », et qu’il fallait finalement y

voir « une faute heureuse ».

Les millions de victimes de ces évènements n’ont

sans doute pas été aussi sensibles que le pape aux

effets positifs et bénéfiques de la conquête espagnole,

de la colonisation qui s’ensuivit et de la mise en esclavage

qu’ils ont subie : Rien qu’une suite d’épiphénomènes

!

A refaire l’histoire à l’aide de formules choisies, on en

oublie toute la somme de souffrances endurées. On efface

la mémoire de la victime et on fait disparaître l’existence

du bourreau quand on ne fait pas de lui un bienfaiteur

ou un saint.

115

Au comble de la superstition institutionnalisée :

« statuettes de Vierge à râcler », « images de

saints à avaler », pour trouver le salut. Se libérer

de ses péchés en achetant des « indulgences »

Question :

Il y a peu, sur Internet, j’ai vu, proposée aux enchères,

une statuette de Vierge à râcler provenant de

Altöting ainsi que des images de saints à avaler. Pouvez-

vous m’expliquer de quoi il s’agit ?

Réponse :

A cette question, nous pourrions en ajouter une

autre : En absorbant ces petits morceaux d’images de

saints ou en grignotant chaque jour quelques copeaux

râclés sur une de ces statuettes, est-il possible de parvenir

à la sainteté ?

Mais répondons tout de suite à la première question.

La tradition des vierges à râcler est issue du Moyenâge

et a persisté jusqu’au 20ème siècle, en Europe Centrale.

En absorbant de minuscules copeaux de bois, de

pierre ou de plâtre provenant de ces statues ou en avalant

de petits morceaux d’images représentant des

saints, on était sensé trouver la guérison, effacer ses

péchés, voir un voeu se réaliser, etc…

Sur le site de l’Eglise catholique suisse www.kath.ch,

nous avons trouvé une évocation de la Vierge à râcler

116

du couvent de Einsiedeln. On peut y lire ce qui suit :

« On en râclait de minuscules particules pour les manger.

» Le Dr Müller, dans son livre « Mittel zum Heil »

(« Les moyens pour atteindre le salut »), écrit à ce

sujet (il s’agit de notre propre traduction) : «En cas de

besoin, pour s’annexer une substance curative, une des

possibilités les plus connues était de râcler la glaise

d’une statue de Madone à râcler. On pouvait se procurer

des copies réduites de la statue miraculeuse dans

différents lieux de pèlerinage. Les vierges noires à râcler

provenant de Altötting en Bavière, ainsi que les copies

miraculeuses faites au couvent de Einsiedln, étaient les

plus célèbres et les plus prisées, et ceci jusqu’au 20ème

siècle. Les Madones à râcler de Einsiedeln passaient

pour particulièrement miraculeuses et curatives car,

selon ce qui est raconté, de la terre et du mortier de la

chapelle miraculeuse, ainsi que des particules de reliques

étaient mélangés à la glaise servant à leur confection.

Seules les Madones à râcler vendues par le

couvent et portant au dos son estampille disposaient

de ces propriétés. »

Espérons que les particules de reliques dont il est

question ici n’étaient pas des restes de cadavres humains

!

Toujours sur le site de l’Eglise catholique suisse, on

fait référence aux images saintes à consommer. Dans

le livre du Docteur Müller, on peut lire ce qui suit à ce

117

propos : « Par le passé, il était possible d’acquérir des

images à avaler dans de nombreux lieux de pèlerinage.

Pour l’acheteur il était important que les images aient été

bénies par un prêtre et si possible qu’on les aient mises

en contact avec la statue miraculeuse vénérée sur le

lieu de l’achat. »

Il faut expliquer qu’à l’époque, il existait des reliques et

des répliques de reliques. Pour que la réplique possède

les vertus et les qualités de l’original, il suffisait de la mettre

en contact physique avec l’original. C’est pour cette raison

que les acheteurs désiraient ardemment que leurs images

à avaler aient touché au préalable une relique afin d’en

obtenir un surcroit d’efficacité.

Mais retournons au livre du Dr. Müller : « Les images,

bien souvent pas plus grosses qu’un timbre-poste,

étaient ingurgitées en cas de danger ou de détresse, on

en donnait également à consommer aux animaux malades.

Les images sacramentales à avaler étaient considérées

comme une sorte de médicament disposant d’une

grande force sous l’effet de la bénédiction délivrée par

le prêtre. »

La définition d’objet sacramentel donnée officiellement

par l’Eglise est la suivante (traduction) : « Objet sacré

et béni tels que huile, sel, feuilles de palmiers, croix,

médailles de pèlerinage, offrant au croyant protection et

bénédiction, le protégeant du malheur et lui permettant

d’espérer la guérison. »

118

Le Dr. Müller nous apprend également qu’ « en 1903

encore, la Congrégation romaine des rites approuva l’utilisation

des images à avaler. Cette coutume était déjà

connue dans l’Antiquité. » Ce qui est une autre façon

d’admettre que l’usage des images saintes à avaler n’est

rien d’autre qu’une coutume païenne.

Réfléchissons un instant à ce qui se passerait et à

ce que certains ne manqueraient pas de dire si toute

autre communauté religieuse que l’Eglise catholique

procédait à de telles pratiques ?

On parlerait sans aucun doute de superstition et on

mettrait sérieusement en doute la santé mentale des

membres de cette communauté ! Et si toute autre communauté

que l’Eglise catholique procédait sur Internet à

la vente de vierges à râcler aux vertus miraculeuses et

curatives, les services du ministère de la santé interviendraient

immédiatement auprès de la justice en dénonçant

une forme d’exercice illégal de la médecine.

D’autres lecteurs et auditeurs nous interrogent concernant

toutes ces coutumes étranges en vigueur dans

l’Eglise catholique :

Question :

D’où provient la coutume consistant à se traîner à

genoux pour obtenir une indulgence, comme c’est le cas

à Altötting (en Bavière) ou à Rome ?

119

Réponse :

La coutume consistant à se traîner à genoux pour

obtenir une indulgence est apparentée à la pénitence.

En accomplissant certains actes appelés pénitences

dont l’efficacité se mesure au degré de souffrance qu’ils

génèrent, on peut se libérer de ses péchés ou des peines

engendrées par ceux-ci. De telles pratiques sont

communes dans le paganisme. Elles sont souvent associées

à la confession, comme dans le Jaïnisme, dans

le culte d’Anetis, dans les mystères de Samothrace ou

encore dans le culte d’Isis.

Dans son livre « La foi falsifiée », Karl Heinz

Deschner, célèbre historien allemand des religions décrit

ces pratiques : « …sous la menace du prêtre, les

pécheurs se jetaient sur le sol, se frappaient la tête contre

la porte sainte, demandaient pitié aux « purs » en

les couvrant de baisers…». Il poursuit : « …après qu’ils

se soient repentis, on lançait en l’air des copeaux de

bois et des brins de paille et on poussait des cris d’allégresse.

Tous les péchés étaient emportés par le vent. »

Dans certains cultes de mystères, on confessait ses

fautes au prêtre, considéré comme le représentant de

la divinité, et cela dans le but d’être libéré des conséquences

possibles de ses actes. K. H. Deschner indique

à ce propos : « Dans le culte d’Isis, il existait un système

d’indulgences très élaboré tel qu’on le retrouvera

120

plus tard dans le catholicisme. Ainsi, même les cas

d’apostasie, c’est-à-dire de reniement de la foi, faisaient

l’objet d’une indulgence »

L’enseignement du Saint-Siège regorge de

contradictions, de non-sens et d’absurdités.

Pourtant, refuser d’y croire c’est prendre le

risque d’être excommunié, perdu et

damné pour l’éternité

Au cours des chapitres précédents, nous avons eu

l’occasion de rappeler que selon les prescriptions de

l’Eglise catholique, les fidèles sont tenus d’accepter et

de croire l’enseignement de l’Eglise dans sa totalité sous

peine d’être damnés pour l’éternité.

A ce sujet, un auditeur nous pose la question suivante

:

Question :

« Par le passé, on pouvait lire dans le Neuner-Roos (il

s’agit d’un ouvrage fondamental de synthèse décrivant

en quoi consiste la foi de l’Eglise catholique à

travers ses propres documents officiels. Non disponible

en français) : « damné éternellement ». Aujourd’hui

le mot damné a été remplacé par « exclu ».

Faut-il en conclure que désormais on n’est plus damné

pour l’éternité si l’on doute de l’Eglise catholique ?

121

Réponse :

Non, ce serait une erreur que d’en tirer cette conclusion.

Dans ce contexte, « être exclu » signifie toujours

être damné pour l’éternité. Autrefois on exprimait cela

en termes moins hypocrites. Aujourd’hui, cette formulation

a été simplement adaptée à l’époque et aux mentalités

afin d’apparaître moins radicale. Pourtant son sens

reste le même car être exclu signifie : être exclu du salut

donc voué à la damnation éternelle.

Dans le texte original en latin, il est écrit : « anathema

sit » autrement dit « qu’il soit damné ».

Voici une hypothèse pour expliquer cette nouvelle formulation

: Alors qu’à notre époque, sous la pression des

opinions publiques, les grandes confessions font assaut

d’amabilités réciproques par souci d’oecuménisme bien

compris, cela ferait quelque peu désordre que de vouer

à la damnation ceux à qui on est sensé tendre la main

car, rappelons-le, si l’on s’en tient au dogme catholique,

tous les membres des autres confessions sont voués à

la damnation éternelle, car seule l’appartenance à la vraie

religion est gage de salut.

Voilà ce que l’on peut lire à ce propos dans un

document officiel de l’Eglise produit à l’occasion du

Concile de Florence : « La très sainte Eglise romaine,

fondée par la voix de notre Seigneur et Sauveur… croit

fermement, professe et prêche qu’aucun de ceux qui

se trouvent en dehors de l’Eglise catholique, non

122

seulement païens mais encore juifs ou hérétiques et

schismatiques ne peuvent devenir participants à la vie

éternelle, mais iront « dans le feu éternel qui est préparé

par le diable et ses anges» (Mt 25, 41)… »* Au même

titre que tous les autres documents officiels de l’Eglise,

celui-ci est encore parfaitement valide et reconnu par

l’institution.

Le « représentant de Dieu sur Terre » ne

devrait-il pas être maître des éléments ?

Jésus de Nazareth l’était

Un auditeur nous pose la question suivante :

Question :

« En juin 2005, sur Radio Vatican, j’ai entendu qu’en

raison de la sécheresse catastrophique qui sévissait

en Australie, il avait été décidé d’un jour de prière

pour la pluie. Mais, en toute logique, prier Dieu pour

obtenir la pluie, c’est le considérer comme responsable

du temps qu’il fait ? D’où vient cette croyance ?

N’est-ce pas une manifestation de paganisme pure

et simple ?»

* Concile de Florence, 1438-1445 - Bulle sur l’union avec les

coptes et les Ethiopiens, « Cantate Domino «, 4 février 1442/

Décret pour les jacobites

123

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